top of page

GENS QUI INSPIRENT

MARGUERITE BARANKITSE 
LA MÈRE AUX 10 000 ORPHELINS

On l’appelle « la folle du Burundi » et elle ne s’en défend pas; au contraire, elle clame haut et fort sa folie pour la vie et pour les enfants orphelins, victimes des conflits ethniques de 1993. Pour elle, la haine n’aura pas de dernier mot. Mais qui est cette femme dont le surnom a fait le tour du pays et dont peu en savent beaucoup plus? Marguerite, plus connue par son diminutif de « Maggy », a mené une vie hors de l’ordinaire.
Son accueil inconditionnel des enfants, indépendamment de leur origine et de leur religion, lui vaut une reconnaissance internationale.

Source : Wikipédia.

© photo : Edbarseghyan, 2016

Elle a perdu son père très jeune et, auprès de sa mère qui avait adopté huit enfants orphelins, elle a grandi dans une famille élargie où le partage et l’amour du prochain était à l’honneur. Jeune fille, elle rêvait de construire des villages pour les enfants laissés à eux-mêmes. Elle étudie pour devenir enseignante, complète sa formation en France et à son retour, elle devient professeur de français au secondaire et encadre des jeunes en dehors des heures de classe. À 23 ans, elle accueille cinq enfants dans sa maison, sans distinction ethnique. Après des études administratives en Suisse, elle est embauchée comme secrétaire à l’évêché de son diocèse jusqu’au drame de 1993.

Les temps sont durs et le nombre d’orphelins du génocide ne cesse d’augmenter. Des ONG internationales et un nombre croissant d’amis du monde entier permettent de développer des infrastructures afin de poursuivre l’œuvre de Maggy. Son village n’est pas la seule région traumatisée et pour répondre aux besoins croissants, elle ouvre d’autres centres pour accueillir ces enfants orphelins. Les enfants eux-mêmes baptisent leur centre « Maison de la Paix » et l’organisation deviendra « Maison Shalom ». Maggy réfléchit sur la durabilité de ses maisons et maintient ses efforts d’identification des origines des enfants qu’elle a recueillis. L’objectif est de retrouver leurs familles et leur permettre de retourner chez eux.

Son accueil inconditionnel des enfants, indépendamment de leur origine et de leur religion, lui vaut une reconnaissance internationale.

 

Avec le retour de la paix au Burundi, la Maison Shalom change graduellement d’approche dans ses activités. S’amorce alors le virage communautaire vers le développement humain durable dans le milieu de l’enfant, sans laisser de côté l’aide d’urgence. Grâce aux acteurs socio-économiques, politiques et religieux, les activités de la Maison Shalom visent une approche holistique de l’enfant : santé, éducation, culture, justice et activités génératrices de revenus particulièrement dans le secteur agropastoral. Maggy leur apprend à cultiver la terre, promener les vaches, soigner les chèvres. « Je ne veux pas que ces enfants finissent par croire qu’ils sont des fils d’Européens et qu’ils soient incapables de se débrouiller au Burundi ». Son accueil inconditionnel des enfants, indépendamment de leur origine et de leur religion, lui vaut une reconnaissance internationale : Prix des droits de l’homme attribué par la France, prix Nobel des enfants, prix de la défense des personnes déplacées et Légion d’Honneur…

Pendant la crise de 2015 au Burundi, la Maison Shalom poursuit sa mission d’assistance aux plus vulnérables de la société et s’implique dans l’encadrement moral des familles éprouvées, s’occupe de l’évacuation à l’étranger des blessés et assiste juridiquement les enfants arrêtés et emprisonnés. En mai, Marguerite est mise sur la liste des putschistes, figure parmi les personnes dangereuses pour le pays et un mandat d’arrêt est émis contre elle. Les employés de la maison Shalom sont menacés et d’autres sont accusés de servir de transmissions de financement en provenance de l’Europe. Les comptes bancaires de Maggy et de la Maison Shalom sont bloqués par ordre du procureur général de la République. Menacée de mort, Marguerite se résout à fuir le Burundi et trouve refuge en Belgique d’où elle continuera son combat.

vol. 121, no 3 • 15 octobre 2016

bottom of page